Une étude menée sur vingt ans de données (2002–2022) révèle un effet inattendu : le passage du Tour de France dans une commune ferait légèrement reculer le vote pour l’extrême droite à l’élection suivante. Un résultat qui interroge sur le rôle du sport comme instrument de cohésion et de soft power territorial.
Des chiffres précis, un effet mesuré
Chaque été, le Tour de France traverse plus de 2 000 kilomètres de routes, relie des villages que tout oppose, et fait entrer la France des territoires dans les écrans du monde entier.
Mais au-delà du spectacle sportif, cette caravane aurait-elle aussi un effet sur… Les comportements électoraux ?
Les chercheurs ont comparé les résultats électoraux de milliers de communes françaises selon qu’elles aient été ou non situées à proximité du tracé du Tour (moins de 10 km).
Résultat : le vote pour l’extrême droite baisse en moyenne de 0,3 à 0,4 point dans ces zones.
L’effet n’est pas spectaculaire, mais il est statistiquement significatif et plus marqué en 2022, où il atteint environ -0,13 à -0,16 écart-type.
Le double ressort : symbolique et économique
Deux leviers principaux ressortent de l’analyse :
- Le levier symbolique : le passage du Tour crée un moment de reconnaissance collective. Pendant quelques heures, la commune devient visible, célébrée, filmée. Ce sentiment d’appartenance à la « France du direct » renforcerait la cohésion locale.
- Le levier économique : dans les mois qui suivent, les chercheurs observent une légère hausse du PIB par habitant (environ +56 € par rapport à la moyenne nationale). L’emploi ne bouge pas significativement, mais l’activité économique locale semble, elle, stimulée.
Autrement dit, le Tour agit à la fois sur le ressenti et sur la réalité. Un mélange de fierté et de flux économiques, capable d’influer marginalement sur les comportements collectifs.
Le soft power à la française
Ce que décrit l’étude, c’est une forme de soft power territorial.
Un outil d’influence et de cohésion qui ne passe ni par la politique, ni par la communication, mais par le récit commun qu’incarne le Tour : celui d’un pays traversé, vu, et reconnu.
Dans des territoires parfois fragilisés, ce simple passage peut réactiver un sentiment de fierté : la France « invisible » devient, l’espace d’une journée, la France visible.
À relativiser, mais à méditer
L’étude reste prudente : les effets sont modestes, et ne remplacent évidemment pas les politiques structurelles (emploi, santé, éducation).
Elle n’établit pas de causalité directe entre le passage du Tour et les urnes, mais une corrélation robuste fondée sur vingt ans de données.
Ce qui en ressort, c’est une idée plus large : le sport comme catalyseur de lien social et de reconnaissance.
Un événement itinérant peut laisser des traces invisibles : dans l’économie locale, dans la mémoire collective… Et parfois, un peu, dans les urnes.
3 réponses
Il serait intéressant de savoir si le passage du TDF fait également reculer les votes en faveur de l’extrême-gauche ?
Complètement d’accord ! L’étude aurait mérité d’être plus complète sur ce point.
Attention, il y a un biais évident dans cette étude. Les communes qui ont été peu traversées par le tour de France sont très probablement les plus petites.
Et on sait que l’extrême droite fait des scores plus élevées dans les petites communes. Une corrélation n’est pas la démonstration d’une relation de cause à effet.